Michée CHAUDERON, guérisseuse
Je reprends ici l’intégralité d’un texte issu du site https://natureetsorcellerie.fr/ à l’occasion d’une exposition MAGIE ET SORCELLERIE qui se tient au muséum de Toulouse jusqu’au 31 octobre 2021. Je remercie ici mon frère Philou de Toulouse pour le tuyau.
IL est fait mention dans ce texte d’une guérisseuse, Michée Chauderon, et de ce que peut représenter dans l’imaginaire collectif une femme forte et indépendante qui utilise les herbes et son bon sens pour ramener les gens sur le chemin de la santé. Les raccourcis sont nombreux surtout s’ils peuvent mener à la prise de pouvoir de certaines castes (masculines notamment) se sentant menacées dans leur toute puissance (à leurs yeux en tous cas). Alors ne craignez plus les sorcières, guérisseuses, chamanes, naturopathes, magnétiseuses, énergéticiennes, vous seriez surpris.e.s de leur attachement à la Terre mère, de la chaleur de leur Cœur et de leur bienveillante sororité (très volontairement, je n'écris pas «bienveillance fraternelle»…). Je vous laisse lire ce fameux texte ci-dessous. Porta pé pla. Adichatz.
« Les sorcières peuplent les contes et légendes de la culture européenne. Elles sont aussi de plus en plus présentes dans les fictions contemporaines. De nos jours, ce sont des femmes fortes, intelligentes, libres, émancipées, voire féministes. Pourtant, il y a quelques siècles, la sorcière était celle qu’il fallait brûler.
Chasse aux sorcières
Le mythe de la sorcière qui se rend au sabbat sur son balai s’est forgé au cours du Moyen Âge. Mais c'est au début des Temps modernes, sur fond de préjugés populaires et de superstitions, que s’est déroulée la grande chasse aux sorcières européenne. On accusait de pactiser avec le diable ces femmes qui n’allaient pas à la messe, vivaient seules, connaissaient les plantes, possédaient des amulettes ou tout objet rituel jugé douteux ou compromettant.
À la fin du XVe siècle, Michée Chauderon correspond à la figure de la sorcière façonnée par la croyance populaire. C’est une vieille guérisseuse, veuve et célibataire. Elle possède sans doute un balai pour faire le ménage, vit peut-être avec un chat noir et, pour peu qu’elle ait le nez crochu et un chapeau pointu, le tableau serait parfait. Quoi qu’il en soit, le 6 avril 1652, la vieille femme est pendue et brûlée en place publique. Elle sera l’une des dernières victimes de la chasse aux sorcières, qui a compté plus de 100 000 procès en sorcellerie.
Vie, chute et mort d’une guérisseuse
Michée est une jeune savoyarde qui s’installe à Genève pour travailler comme domestique. Libre et indépendante, elle entretient des relations extraconjugales. C’est un problème. Elle tombe enceinte, perd l’enfant, est bannie de Genève avec son compagnon d’alors, Louis Ducret, qu’elle épousera par la suite. Malheureusement, Louis meurt assez rapidement et Michée se retrouve veuve, statut qui entachera d’autant plus sa réputation.
Femme seule, veuve et analphabète, Michée a peu de choix : elle se fait blanchisseuse. Ce métier la met en relation avec un grand nombre de familles qui profitent de ses talents de guérisseuse. Malgré sa simplicité, sans ingrédients magiques ou autres jus de pustules batraciens, les potions de la blanchisseuse sont appréciées pour leurs bienfaits. On y trouve du gros sel, de la farine, du pain, des fèves, autant d’éléments nutritifs que la sagesse populaire juge bons pour la santé. Une sorte de soupe d’acides gras omega 3 en somme !
La chute de Michée Chauderon est aussi terrible que typique des procès en sorcellerie. Alors qu’elle décide de stopper net son activité, sans doute par peur des représailles, les femmes qui venaient la consulter font courir la rumeur selon laquelle la blanchisseuse serait une sorcière qui aurait pactisé avec le diable. La réputation et le statut social de Michée font le reste. A cinquante ans, considérée comme inutile aux yeux de la société, elle devient un bouc-émissaire.
Résonance contemporaine
Détentrice d’un savoir alternatif, Michée Chauderon, à l’instar des herboristes, soignantes, praticiennes, représentait un contre-pouvoir effectif et concurrentiel face à la confiscation académique du savoir par les hommes. Au fil du temps, après des siècles de haine et d’obscurantisme, s’est opéré un renversement notable de l’image de la sorcière qui témoigne de la place grandissante des femmes dans l’espace social. Aujourd’hui, la sorcière incarne la femme autonome, émancipée, qui tend à s’affranchir de toutes les dominations".